En cette fin d’année scolaire, nombre de personnes (séparées) se posent la question du déménagement, et de ses conséquences sur la fixation de la résidence de l’enfant, et de l’inscription dans une nouvelle école ! L’inquiétude monte lorsque l’on consulte Google (non, Google n’est pas votre ami sur ces points, tout simplement car votre situation est unique, pas un seul dossier n’est similaire quand il s’agit de parler d’enfant et de fixation de leur résidence chez l’un des parents) et qu’on lit avec effroi que le parent qui déménage perd systématiquement la garde de son enfant.
Les choses sont bien plus complexes que cela, et sont à adapter à chaque cas.
Nombre de critères vont rentrer en compte (déménagement de complaisance, pour raisons professionnelles, financières, pour rejoindre un nouveau conjoint, déménagement fait sans en avertir l’autre parent, en péril de ses droits, ou déménagement anticipé avec saisine du juge aux affaires familiales en amont afin de conserver un équilibre, environnement, pratique antérieure, etc) mais également l’aléa judiciaire !
Toujours est-il il que nombre de questionnements gravitent autour de cette question du déménagement et de la garde des enfants, d’autant plus lorsque nous arrivons en fin d’année scolaire et que le parent qui souhaite déménager doit anticiper une inscription dans un nouvel établissement scolaire.
Le problème se pose en réalité uniquement quand le parent qui part bénéficie de la résidence exclusive de l’enfant avec un droit de visite et d’hébergement pour l’autre parent, ou lorsqu’une résidence alternée était en place.
Commençons par un exemple « qui fait peur », un dossier qui a duré de nombreux mois, avec trois décisions de justice rendues en une année. Madame a la résidence de l’enfant fixée chez elle depuis ses trois ans (date de séparation des parents). Monsieur n’a toujours bénéficié que d’un droit de visite et d’hébergement dit classique (une fin de semaine sur deux et la moitié des vacances scolaires). Nous avons un déménagement prévu de la mère en septembre. Elle en informe son ex conjoint. Ce dernier effectue une saisine du juge aux affaires familiales, alors que la mère souhaitait le faire afin de montrer sa bonne foi, mais elle est devancée par le père. Date d’audience fixée en urgence en septembre, Madame a déjà dû quitter la région car son nouvel emploi n’attend pas. En attendant la décision du juge et afin de ne pas pénaliser Monsieur, Madame laisse l’enfant au père. Vient l’audience. Madame perd la garde. Seul argument qui avait été retenu à l’époque : l’enfant ne doit pas être changé d’école en cours d’année (nous ne sommes qu’en septembre) pour ne pas être déstabilisé (ce qui était somme toute, un argumentaire assez contestable, les repères parentaux étant bien plus importants que les repères scolaires). Le fait que la saisine du juge ait été de l’initiative de Monsieur joue également contre Madame à mon sens (d’où l’importance d’anticiper et de vouloir préserver les liens de l’enfant avec son autre parent).
Nous faisons appel : le juge confirme la décision. Nous sommes en plein milieu de l’année scolaire, il est dès lors impensable pour le magistrat d’ordonner le changement de résidence à ce moment de l’année. Également, il note que le déménagement de Madame est de son souhait, et qu’elle a sollicité sa mutation pour se rapprocher de son nouveau compagnon. Mais, Monsieur aussi déménage un an plus tard, à plusieurs heures de route de son domicile actuel. Cela ne rapproche pas davantage les residences des deux parents. Rappelons que l’enfant avait toujours vécu avec sa mère, avec simplement un droit de visite et d’hébergement pour le père. Il n’y a donc que la dernière année qui a été passée chez le père. Quand Monsieur a déménagé, nous avons anticipé et saisi à nouveau le juge, en juillet. Nous avons sollicité une date à bref délai, afin d’avoir une décision avant la nouvelle rentrée scolaire. Il se trouve également, que la vie de cet enfant n’était pas des plus épanouie chez son papa. Le juge entendant nos arguments, ce qu’avait toujours connu l’enfant hormis la dernière année, le fait que l’enfant allait de toute façon devoir changer d’école, et qu’il était bien plus épanoui en résidant chez sa mère, nous a donné gain de cause. Avec le recul sur ce dossier, et en l’état de mon expérience, si Madame avait anticipé davantage son déménagement et saisi le tribunal avant l’été, elle aurait pu avoir gain de cause dès la première décision, l’enfant ayant toujours résidé avec elle. L’argumentaire du premier juge était uniquement axé sur la perte des repères scolaires.
Vous le lisez donc, la question n’est pas simple.
Tout dépend également de la distance entre les domiciles : partez-vous à 1h30 de route ou à 5h ? Dans le premier cas, le parent qui ne part pas pourra continuer à voir l’enfant un week-end sur deux. Dans le deuxième cas, le droit de visite et d’hébergement du parent hors période de vacances scolaires sera impossible.
Or, le juge gardera toujours en tête que votre déménagement ne doit pas mettre en péril les droits de l’autre parent.
Dans le cas d’un déménagement lointain, puisque un weekend sur deux ne sera plus possible, proposez d’augmenter le droit de l’autre parent en périodes de vacances scolaires : vous aurez moins de la moitié des vacances, et l’autre parent davantage.
Vous l’aurez compris, un déménagement à 1h30 de route ne vous fait pas courir grand risque de changement de résidence, dans le cas d’une résidence fixée chez vous avec un DVH pour l’autre parent. Un déménagement lointain posera déjà plus de difficulté.
Et enfin, la question sera bien plus délicate dans le cas d’une résidence alternée. Dans ce cas précis, et sauf manquement grave de l’autre parent, il est vrai que le parent qui part sera pénalisé et que dans la majorité des cas, il ne bénéficiera plus de la résidence de son enfant, mais simplement d’un droit de visite et d’hébergement, réduit du fait de la distance.
Je mets toutefois une petite parenthèse : nous avons eu le cas d’un magistrat, qui a ordonné une résidence alternée entre deux parents dont l’un vit en métropole, l’autre sur une île d’outre mer, pour des périodes d’un an chez l’un, puis d’un an chez l’autre. Rien n’est donc impossible ! Mais pensez à l’intérêt de votre enfant avant tout : est-il sain pour un jeune enfant de changer de résidence chaque année ?
Dans le cas d’un déménagement à venir, je saisis à bref délai, ce qui permet d’obtenir une date en urgence (environ deux mois pour avoir une décision contre 10/12 mois en circuit classique). Mais attention, car cette question revient de plus en plus souvent de sorte que les délais se rallongent. Pour conserver des dates raisonnables et pouvoir anticiper une inscription pour la rentrée scolaire de septembre, il faudrait déposer une requête devant le juge aux affaires familiales (parlant pour ma part, des délais à Pontoise) avant la fin juin, maximum, début juillet.
D’où l’importance de :
- anticipez votre déménagement et prévenez le plus tôt possible l’autre parent de votre projet ! Cela est primordial et est d’une grande importance devant le juge.
- prévoyez une saisine du juge aux affaires familiales si l’entente est compliquée avec l’autre parent. Cela démontre votre bonne foi.
- gardez en tête que vous devrez peut-être passer quelques jours de moins de vacances scolaires avec vos enfants, pour compenser le fait que l’autre parent ne les voit plus aussi souvent, et ainsi, lui laisser plus de jours.
- mettez en avant, dans vos arguments, le fait que vous n’êtes pas parti sans rien dire à l’autre parent et en le laissant dans la m*erde (oups). Au contraire, vous avez anticipé, saisi le juge, pour que ses droits soient aménagés et non réduits ! Simplement, répartis différemment.
- vous pourrez également montrer votre bonne foi sur la question de la charge du transport : proposez de prendre à votre charge le transport, matériellement ou financièrement (si prise de train ou d’avion nécessaire).
- anticipez pour la nouvelle année scolaire, car le magistrat est réticent à enlever ses repères à l’enfant en cours d’année.
- particulièrement dans ce cas là, faites vous assister d’un avocat, car le déménagement peut être mal vu selon les magistrats, et il faudra trouver les mots justes.
Sur ce, n’hésitez pas à me contacter pour saisir le juge aux affaires familiales. Je suis compétente dans le ressort de Pontoise, Versailles, Nanterre, Chartres et me déplace également sur Beauvais, Rouen, Évreux. Avocate en droit de la famille, je m’occupe des dossiers de divorce, mais également de garde d’enfant.